Ça commence avec une simple question matinale. Ça
va ? Et répété mille fois par jour ça finit par cette série d’affiches. « Bonjour,
ça va ? » est une norme sociale, quelque chose qu’on dit tous parce
que c’est ce qu’il faut dire. Parce qu’on vous regardera mal si vous ne le
dites pas. Mais en toute honnêteté, qui s’intéresse à ce qu’on nous répond.
La
moyenne que j’ai établie après avoir enregistré plus d’une centaine de réponses
veut que 81 % des gens interrogés répondent automatiquement « oui »
et 19% « non ». Le découpage de ces réponses permet de voir qu’il y a
très peu de réponses originales. Pour les « oui », on peut les
répartir ainsi :
Les « non » pourraient se relèveraient
presque intéressante (si on retire les 67% de « non, j’ai mal
dormi ») si dès qu’on obtenait un semblant de vérité (traduit généralement
par « non, j’ai des problèmes chez moi, avec mes parents, avec ma
copine ») les gens ne s’arrêtaient pas immédiatement après. Parce qu’on
vous regardera mal si vous ne le faite pas. Le terme de mensonge conventionnel
prend ici tout son sens. Mentir, c’est mal. Mais on s’enfiche si c’est pour
laisser les autres en paix avec leurs propres problèmes.
J’ai cherché dans l’esthétique de l’affiche
publicitaire, de l’affiche de prévention, voir limite du t-shirt fashion, et de
l’artiste sur qui est basé ce travail (à savoir John Giorno) je retiens
essentiellement une idée : opposition entre texte et image. Pour le visuel
de mon projet j’ai donc tapé d’abord et avant tout le selfie : je te
montre comme je m’amuse bien justement parce que je m’ennuie et que j’ai du
temps à tuer. Des photos donc de personnes tout sourire ou bouche en cœur,
rehaussé des troubles qui touchent chacun d’entre eux. Boulimie mentale,
anxiété, anorexie mentale, bipolarité, hyperactivité. Puis j’inverse. Le texte,
les mots rassure sur un état plus que douteux, automutilation, transsexualité.
Une autre chose que je souhaitais soulever par ce
travail, c’est un problème porté essentiellement par les réseaux sociaux en ce
moment, essentiellement sur twitter et tumblr. La banalisation des troubles
mentaux. Certes de nombreux groupes de soutien aux personnes en guérison se
sont créés sur la toile, mais plus nombreux sont les blogs qui rendent
« cool » la bipolarité. A mes yeux le pire de tout reste le phénomène
Thinspiration (Thinspo pour les intimes). Majoritairement des filles de 14 à 22
ans qui se soutiennent H24 dans des modes de régimes frôlant les mouvements
pro-ana (pro-anorexie), où on trouve photos, repas, soutient, poids, au fond
des modes très réfléchis et très efficaces pour perdre beaucoup trop de poids.
Pour vraiment travailler ce sujet, je devrais sans
doute emmener ce projet plus loin, sur la toile sans doute, pour batailler
directement avec les lionnes du net.